Art. 3

CHAPITRE 2

La décision et les parties

A. La décision

I. Notion

Art. 3

Est considérée comme une décision au sens de la présente loi toute mesure prise par les autorités dans des cas d’espèce, fondée sur le droit public fédéral, cantonal ou communal, ayant pour objet:

a)  de créer, de modifier ou d’annuler des droits ou des obligations;

b)  de constater l’existence, l’inexistence ou l’étendue de droits ou d’obligations;

c)  de rejeter ou de déclarer irrecevables les demandes tendant à créer, modifier, annuler ou constater des droits ou des obligations.

Sont aussi considérées comme décisions les mesures d’exécution, les décisions incidentes, les décisions sur opposition, les décisions sur recours, les décisions prises en matière de reconsidération ou de révision et les décisions prises en matière d’interprétation.

Lorsqu’une autorité rejette ou invoque des prétentions à faire valoir par voie d’action, sa déclaration n’est pas considérée comme une décision.


Le litige porte sur le prélèvement d’intérêts moratoires sur les impôts sur les gains immobiliers réalisés par les contribuables en 2010. Cette contestation ne porte dès lors pas directement sur une décision de taxation puisqu’elle ne fixe pas les éléments imposables (gains immobiliers) qui ne sont plus litigieux. Il ne s’agit pas non plus d’une décision constatatoire au sens de la doctrine. On peut ainsi admettre qu’il s’agit d’une « autre décision » telle que prévue par l’article 216 al. 1 LCdir et que celle-ci ne nécessite pas, à ce titre, que la voie de la réclamation soit épuisée. Une décision du service intimé serait dès lors directement attaquable devant la CDP. Il convient de déterminer si les bordereaux d’intérêts moratoires du Service des contributions du 19 février 2016 ou encore le courrier du 14 avril 2016 peuvent, respectivement doivent, vu leur teneur, être considérés comme ayant valeur de décision au sens de l’article 3 LPJA en lien avec l’article 4 LPJA. L’article 3 al. 1LPJA définit la décision comme toute mesure prise par les autorités dans des cas d’espèce qui, fondée sur le droit public fédéral, cantonal ou communal, a pour objet soit de créer, de modifier ou d’annuler des droits ou des obligations (let. a), soit de constater l’existence, l’inexistence ou l’étendue de droits ou d’obligations (let. b), soit encore de rejeter ou de déclarer irrecevables des demandes tendant à créer, modifier, annuler ou constater des droits ou obligations (let. c). En font partie les décisions incidentes (art. 3 al. 2 LPJA). L’obligation de faire figurer dans l’acte le mot « décision » ou le verbe « décider » ne doit pas être considérée comme une règle de droit impératif, dont la violation pourrait entraîner, à elle seule, la nullité ou l’annulabilité de la décision. En principe, il convient d’interpréter la décision dans le sens que son destinataire pouvait ou devait de bonne foi lui donner. Un éventuel doute sur la portée précise de la décision ne saurait être invoqué si les circonstances et le comportement du destinataire démontrent que celui-ci en avait compris le sens exact (Schaer, op. cit. ad art. 4 al. 1 let. a LPJA, p. 37 et les références citées). CDP.2016.163

La loi définit donc la décision comme une « mesure » prise par les autorités. On entend par là une manifestation de volonté unilatérale exprimée en vertu de la puissance publique et destinée à exercer des effets obligatoires pour son destinataire. Si la mesure ne tend pas, sous l’une des formes énumérées par l’article 3 al. 1 LPJA, à déployer des effets obligatoires sur la situation juridique de l’administré, il ne s’agit pas d’une décision sujette à recours. CDP.2014.156

La simple réclamation d’une somme à un administré n’est pas de nature à créer ou à constater une obligation de ce dernier envers la collectivité. TA.1998.477

Le fait, pour l’exécutif communal, de retirer à un de ses membres l’ensemble de ses compétences et responsabilités dans la direction d’un dicastère en ne laissant subsister que le droit de participer aux séances périodiques du Conseil communal vide la fonction de l’élu de l’essentiel de son contenu. Une telle situation porte atteinte aux droits et obligations résultant de l’élection et à ceux que confère la qualité de membre d’une autorité collégiale. La mesure prise constitue de ce fait une décision sujette à recours et non une simple mesure d’organisation interne. CDP.2013.269

Lorsqu’une autorité rejette ou invoque des prétentions à faire valoir par voie d’action, sa déclaration n’est pas considérée comme une décision. Le législateur a en effet estimé que, dans les domaines visés par l’article 58 LPJA, la collectivité publique concernée et l’administré se trouvaient sur un pied d’égalité et que, dès lors, l’avis de ladite collectivité n’avait pas plus de valeur que la détermination d’une partie en litige. C’est pourquoi, au lieu d’attribuer à la Cour de droit public le rôle d’une autorité de recours qui revoit une décision rendue préalablement, le législateur l’a placé dans la situation d’un juge ordinaire qui se prononce sur une contestation entre les parties. CDP.2012.308

En dehors de tout cas d’application concret, une demande de contrôle abstrait ne peut en effet donner lieu à une quelconque décision au sens de l’article 3 LPJA. CDP.2010.281

La décision comme acte juridique a pour objet de régler la situation d’administrés en tant que sujets de droit et donc, à ce titre, distincts de la personne étatique ou, en d’autres termes, extérieurs à l’administration. On oppose dans ce contexte la décision à l’acte interne ou d’organisation, qui vise des situations à l’intérieur de l’administration ; l’acte interne peut avoir des effets juridiques, mais ce n’en est pas l’objet, et c’est pourquoi il n’est en règle générale pas susceptible de recours (Moor, Droit administratif II, 2e éd. 2002, no 2.1.2.1 p. 156 et no 2.1.2.3 p. 164 ; Wurzburger, in Commentaire de la LTF, 2009, no 52 ad art. 82 LTF ; Bovay, Procédure administrative, 2000, p. 261 ; voir ATF 121 II 473 cons. 2b p. 478 s.). Deux critères permettent généralement de déterminer si on a affaire à une décision ou à un acte interne. D’une part, l’acte interne n’a pas pour objet de régler la situation juridique d’un sujet de droit en tant que tel et, d’autre part, le destinataire en est l’administration elle-même, dans l’exercice de ses tâches. Ainsi, un acte qui affecte les droits et obligations d’un fonctionnaire en tant que sujet de droit, par exemple la fixation de son salaire, d’indemnités diverses ou encore de sanctions disciplinaires, est une décision. En revanche, un acte qui a pour objet l’exécution même des tâches qui lui incombent en déterminant les devoirs attachés au service, telles que la définition du cahier des charges ou des instructions relatives à la manière de trancher une affaire, est un acte interne juridique (ATF 131 IV 32 cons. 3 p. 34 ; Moor, op. cit. no 2.1.2.3 p. 164 ; Grisel, Traité de droit administratif, 1984, p. 863 ; Andreas Keiser, Rechtsschutz im öffentlichen Personalrecht nach dem revidierten Verwaltungsrechtspflegegesetz des Kantons Zürich, in ZBl 1998 p. 211; Michael Merker, Rechtsschutzsysteme im neuen öffentlichen Personalrecht, in Personalrecht des öffentlichen Dienstes, 1999, p. 470 ss; voir aussi, sur les questions de délimitation entre une décision et un acte interne, Thomas Poledna, Verfügung und verfügungsfreies Handeln im öffentlichen Personalrecht – ein Praxisüberblick, PJA 1998, p. 917 ss). Lorsque le fonctionnaire s’oppose à un acte de ce type, ce sont les mesures disciplinaires ou autres moyens de contrainte ressortissant aux règles régissant les rapports internes qui sont susceptibles de s’appliquer (Moor, ibidem). CDP.2010.300

Des déclarations d’intention, des renseignements sur la manière d’interpréter la loi, des propositions ou recommandations, ne sont pas des décisions réputées avoir un effet juridique obligatoire pour l’administré. TA.2005.343

Les autorisations spéciales délivrées par le SAT ont pour effet de créer un droit puisqu’elles visent à autoriser le développeur à installer des mâts de mesure de vent (art. 3, al. 1, let. a LPJA). Elles ne remplissent pas toutes les conditions de l’article 4, alinéa 1 LPJA puisqu’elles ne comprennent pas les termes « décision » ou « décider » et n’indiquent pas de voies de recours. Selon la jurisprudence, ces irrégularités ne prêtent pas à conséquence, tant qu’elles n’entraînent aucun préjudice pour les parties (R. Schaer, Juridiction administrative neuchâteloise, Neuchâtel 1995, pp. 37 et 39). En l’occurrence, ni le développeur ni la recourante n’ont été entravés dans leurs droits; en particulier, lorsqu’elle a pris connaissance des autorisations spéciales, la recourante les a comprises comme des décisions sujettes à recours dans les trente jours devant le Conseil d’Etat. Par conséquent, les autorisations spéciales délivrées par le SAT peuvent, malgré les irrégularités qui les affectent, être considérées comme des décisions. REC.2010.259

L’ordre donné à la police de reconduire en prison un détenu après sa cavale pour continuer d’y purger sa peine n’est pas une décision. RJN 1980-1981, p. 214

L’acte par lequel l’autorité avertit un fonctionnaire qu’elle réexaminera le maintien de ses rapports de service n’est pas non plus une décision. RJN 1980-1981, p. 213

La déclaration selon laquelle une autorité informe un fonctionnaire soumis à une obligation de domicile qu’elle en contrôlera le respect n’est pas non plus une décision. RJN 1986, p. 276

Une lettre reconnaissant l’effet suspensif à un recours qui en est doté de par la loi n’est pas non plus une décision. RJN 1983, p. 264

En revanche, la confirmation d’une décision ne peut pas faire l’objet d’un recours, quand bien même elle s’intitule « décision » et indique des voies de droit. RJN 1983, p. 263 et RJN 1985, p. 270

Des conclusions-constatations de droit sont recevables devant le Tribunal administratif uniquement dans le cadre d’un recours. RJN 1988, p. 243

Les dispositions d’un règlement de police fixant les heures de fermeture des cabarets et des discos ne répond pas à la définition de la décision et ne peut faire l’objet d’un recours. RJN 2000, p. 222

Un permis de construire peut contenir des décisions déclaratives. RJN 1993, p. 226

Le retrait de l’effet suspensif d’un recours éventuel, prévu par la décision au fond, elle-même attaquée, ne constitue pas une décision incidente. RJN 1993, p. 279